Le REN-LAC lance trois rapports d’études sur la corruption au Burkina.
Les trois rapports d’étude portent sur « les perceptions et présomptions de corruption dans le secteur minier », sur « les présomptions de corruption dans le secteur de la douane », et sur « les valeurs morales, éthiques, et civiques dans le cadre de la lutte contre la corruption». La cérémonie de lancement a eu lieu le 23 décembre 2015 au siège du REN-LAC.
Le Réseau national de lutte anticorruption dont l’un des objectifs majeurs en tant qu’organisation demeure la production de connaissances fiables en vue de mieux orienter la lutte anti-corruption a pour ce faire initié trois (3) études sur des secteurs clés de l’économie burkinabè mais aussi sur les questions civiques, éthiques et morales. Etaient représentés à cette cérémonie les organisations de la société civile, les organisations syndicales, les personnes ressources, des institutions publiques concernées par les différentes études et les partenaires techniques et financiers. Une remise symbolique des rapports d’étude aux structures invitées a ponctué cette cérémonie.
Une tonne et demie d’or par an issue de la production artisanale échappe au contrôle de l’Etat.
Malgré ses importants gisements miniers qui constituent un gros atout pour les investisseurs et un fort potentiel de génération de richesses et d’emplois, le Burkina Faso reste loin d’un véritable décollage économique et reste paradoxalement l’un des pays les plus pauvres du continent africain.
En effet selon l’étude sur « les perceptions et présomptions de corruption dans le secteur minier », l’exploitation minière n’a pas réellement un impact significatif sur l’économie du pays et sur les populations locales. Les investisseurs étrangers qui occupent la quasi-totalité des gisements sont ceux qui ont les plus gros capitaux mais cela génère peu de revenus et d’emplois à l’Etat.
En outre, un autre obstacle au développement du pays est la fraude de l’or. En fait à partir d’études faites sur la commercialisation de l’or au Burkina Faso (BUGECO 1995, BNAF 2014), on estime à plus d’une tonne et demie d’or par an, la production artisanale qui échappe au contrôle de l’Etat.
En conséquence, le manque à gagner est très important, la balance commerciale se déséquilibre.
Pour que les exploitations minières artisanales et à petite échelle deviennent un véritable levier de croissance économique et de lutte contre la pauvreté, il faut que l’Etat assure un suivi et un contrôle effectifs et rigoureux des activités minières.
Au vu des faits et des constatations, on peut conclure que la corruption dans le secteur minier au Burkina Faso, loin d’être une probabilité est une réalité. En effet, à en croire les résultats de l’enquête, 85% des enquêtés et certains faits cités dans ce document, la corruption est une pratique qui existe bel et bien dans le secteur minier au Burkina Faso. Elle passe notamment par l’attribution et la gestion des autorisations et titres miniers.
Les agents de douanes alimentent eux-mêmes les réseaux de corruption internes.
Le secteur de la douane est régulièrement cité comme le secteur le plus touché par les faits et pratiques de corruption.
En fait avec des recettes de 460 milliards en 2013 et une prévision d’environ 500 milliards pour 2014, soit 40% du budget de l’Etat burkinabé, il est indispensable de renforcer le combat contre la corruption dans ce secteur.
Les enquêtes sur « les présomptions de corruption dans le secteur de la douane », ont permis de montrer que malgré les avantages légaux dont bénéficient toutes les catégories professionnelles dans l’administration douanière, ses agents dans leur grande majorité ont contribué à alimenter les réseaux de corruption qui sévissent dans la douane. Les sources de la corruption en milieu douanier sont nombreuses mais la principale repose sur la fraude développée et perfectionnée par des opérateurs économiques sans scrupule, entretenue et encouragée par les plus hautes autorités du pays et les premiers responsables de la Direction Générale des Douanes. Toutes ces personnalités sont en complicité avec certains opérateurs économiques, les principaux acteurs et bénéficiaires de la fraude et de la corruption dans le pays.
Cela se manifeste par des propositions d’arrangements avec les agents des douanes et souvent aussi avec le silence ou la complicité des hauts responsables. L’étude recommande l’adoption par la DGD de moyens logistiques performants de façon à améliorer la gestion des procédures de dédouanement.
Aussi faut-il qu’il y ait une veille afin de faire respecter le principe de rotation de 3 ans dans les affectations : en respectant l’équité et l’égalité des chances entre les postes jugés difficiles et les postes plus aisés. L’établissement de plans de carrière au profit des agents et améliorer leur suivi dans une perspective de permettre à chacun de bénéficier d’une promotion méritée est également une solution.
Enfin il faut que l’Etat prenne des mesures pour instaurer un système d’affectation transparent et débarrassé de tout calcul clientéliste, pour l’exploitation des rapports produits par l’inspection technique et procéder aux sanctions des agents reconnus acteurs de corruption.
Un module d’enseignement centré sur les valeurs morales et civiques et la lutte contre la corruption, une nécessité.
Il ressort du rapport d’étude sur « les valeurs morales éthiques et civiques dans le cadre de la lutte contre la corruption », des recommandations et propositions doivent être matérialisées dans le cadre d’un module d’enseignement destiné aux élèves des cycles inférieurs.
Dans son contenu l’étude met suffisamment en évidence la perte des valeurs au Burkina Faso, cela est assez indéniable et se justifie par la montée en puissance de nouvelles valeurs contraires aux valeurs traditionnelles. L’argent roi tend manifestement à imposer sa loi à tout et à tous.
Les valeurs traditionnelles évoluent elles-mêmes vers la remise en cause de l’idéal d’intégrité qui recule face au développement soutenu de la corruption depuis 1990. L’absence de dispositif de renforcement des valeurs MEC est à noter. Si les nouvelles mutations sociales compliquent le rôle éducatif des parents, les programmes scolaires non plus ne favorisent pas une vraie orientation de l’enseignement vers les bonnes valeurs et vers la lutte contre la corruption.
L’introduction d’un module d’enseignement centré sur les valeurs morales et civiques et la lutte contre la corruption est plus qu’une option, c’est une nécessité.